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Sucy, points d’Histoire
Lettre
mensuelle de la Société Historique et Archéologique de Sucy-en-Brie
N°21 - février 2021
www.shas.fr
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Carnaval à Sucy en 1670
Alors
que le carnaval se terminant à Mardi-Gras et le début du Carême se
placent cette année en février, en raison de la date avancée de Pâques,
il peut être intéressant d’évoquer ce que ces deux événements
représentaient dans l’ancien temps.
Le carnaval, un mot
issu du latin carnelevare, qui signifie « enlever la viande », est
l’héritier de la fête des Lupercales dans l’Antiquité romaine, une fête
qui se déroulait près d’une grotte à Rome, au pied du Palatin, en
l’honneur de Faunus, dieu de la forêt et des troupeaux. Dans le
calendrier catholique, le carnaval prend place entre l’Épiphanie (6
janvier) et Mardi-Gras, veille du début du Carême. Alors que ce temps
peut donner lieu à tous les débordements, alimentaires et sexuels, à
des réjouissances communautaires spontanées plus qu’organisées, au
laisser-aller d’une jeunesse débordante de rires et de plaisirs, le
Carême de quarante jours, qui rappelle le séjour du Christ au désert,
est un temps de pénitence, de jeûne et de répression des convoitises de
la chair, pour préparer les fidèles à la joie de Pâques. Pas de
consommation de viande, de produits laitiers, d’œufs, de graisses et de
sucre, mais de multiples dispenses de ces interdits sont accordées aux
jeunes de moins de 21 ans, aux personnes de plus de 60 ans, aux pauvres
travailleurs et mendiants, aux femmes enceintes, aux malades et aux
fous, de telle sorte que près de la moitié de la population échappe aux
prescriptions de jeûne et d’abstinence.
Mais revenons au carnaval. Dans toutes les paroisses le clergé est
soucieux d’éviter les excès et les accidents qui surviennent
régulièrement en cette période de grande liberté. A Sucy, en mars 1670,
le prédicateur du Carême, en chaire, recommande vivement de commencer
le Carême le jour des Cendres, c’est-à-dire de ne pas prolonger au
lendemain les festivités du Mardi-Gras. Ses exhortations sont reprises
par le procureur fiscal qui interdit à la population de se rassembler
et de faire battre tambour, le mercredi des Cendres étant un jour de
recueillement et de silence. Mal lui en a pris.
En effet Gabriel Legrain, dit « Gueule noire », jardinier et berger au
Grand-Val, ancêtre d’un des membres de la Société Historique de Sucy,
accompagné d’autres villageois excités, fit battre ostensiblement du
tambour dans la Grande-Rue (passant devant le château de Sucy, elle
correspondait à une partie de l’actuelle avenue Pompidou) et brûla
publiquement un mannequin personnifiant le Carnaval, ce qui, suivant ce
que nous dit un document d’époque « amassa quantité de personnes, au
moins jusque à trois cent qui avoient faict des choses du tout
contraires à la piété ». Et le même document d’ajouter : « Gueule
noire, assis à rebours sur un âne, en posture extraordinaire, avoit
causé une grande sédition et rumeur dans ce lieu à telle sorte que
Monsieur le Curé (il s’agit du curé Cheval, bien connu) et le procureur
fiscal furent contraints d’y aller, et ne purent empêcher le désordre,
au contraire en fut fait encore davantage. »
Dessin de Pieter Bruegel l’Ancien
Accueillis par des jurons et des blasphèmes, le curé et le procureur
fiscal furent agressés, assaillis par les villageois qui les
bousculèrent et les frottèrent avec de la neige. « Gueule noire » ne
s’en tint pas là. Il s’en prit au procureur fiscal : « Prends garde à
toy, je t’asseure que je t’attendray au passage quand tu yras plaider à
Chennevières ; je te casseray la teste et te turay ». Naturellement le
procureur dépose une plainte en assurant que le trublion l’aurait
assassiné chez lui, sans l’intervention d’autres personnes. Legrain est
condamné à être mis au carcan et à y demeurer une heure entière pour
manque de respect à la religion, au curé et au procureur fiscal. Il
doit payer 50 livres d’amende pour avoir battu tambour malgré la
défense du procureur fiscal et il lui est fait défense de recommencer «
à peyne de punition corporelle ». Finalement Legrain fait soumission,
échappe au carcan et ne paye que 20 livres d’amende. Les juges du
Chapitre se sont montrés plus cléments que le procureur.
Ces manifestations bruyantes au moment du Carnaval soudent
incontestablement la communauté villageoise et lui permettent
d’exprimer sa rancœur à l’égard des autorités constituées. Mais c’est
aussi pour elle une occasion, en brûlant l’effigie de Carnaval,
d’abolir le temps profane écoulé et d’annoncer la régénération
périodique qu’apporte l’entrée en Carême, temps de jeûne, de pénitence
et de piété renouvelée.
La prochaine exposition de septembre 2021
Malgré le confinement, la SHAS
prépare sa prochaine exposition. Le thème choisi est le suivant : "Sucy
et la nature". Ce thème tiendra compte aussi bien du passé que du
présent.
Il pourrait être annoncé aux écoles, qui auront ainsi l'occasion de contribuer à cet événement.
Pour l'instant uniquement des réunions Zoom pour certains membres de la Shas, mais le travail avance.
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