L’ORIGINALITÉ DES SENTIERS ET DES CHEMINS DE SUCY-EN-BRIE
Situation du village de Sucy-en-Brie in Itinéraires pour une découverte du passé. S.H.A.S. Septembre 1986
Pourquoi le site de Sucy-en-Brie peut-il être interrogé plus précisément à propos de l’environnement naturel ?
Sucy-en-Brie a été un village comme d’autres dans le passé où les
chemins et les sentiers sillonnaient la campagne et les bourgs ; mais
Sucy-en-Brie, proche de la capitale, était dès le XVIIe siècle un lieu
de villégiature apprécié des familles riches et nobles, justement grâce
à cette présence importante de forêts et d’espaces verts. De plus le
village, lui-même a gardé longtemps son aspect rural. Sa situation
géographique et géologique resserrée sur un plateau avec un versant
descendant vers la Marne a nécessité des chemins et des sentiers
permettant la desserte des parcelles cultivées. Ces parcelles assez
petites (2ha pour la plupart et 5 au maximum) étaient consacrées à
l’élevage jusqu’au début du XXe siècle et aux cultures,
particulièrement à la vigne et aux vergers. C’est ainsi que l’on
dénombrait 41 chemins et 24 sentiers. Malgré la transformation et
l’urbanisation évidentes du bourg, l’héritage de la nature est très
présent et nous allons le voir à propos des chemins et sentiers, en
montrant l’importance de leur nombre, leur persistance avec quelques
modifications et même, ce qui est le plus original, une présence
directement héritée du passé au cœur même de la ville.
LES CHEMINS
Ils sont classés en plusieurs catégories:
- Les chemins de grande communication assurant la liaison avec de
grandes routes et des villes plus ou moins importantes et éloignées.
- Les chemins vicinaux qui joignaient les villages voisins. Ces deux types de chemin se recoupent et se rejoignent parfois.
- Les chemins ruraux qui permettaient l’exploitation des bois et cultures.
Des chemins de grande communication et vicinaux se trouvent dans la
partie OUEST du territoire, sur les terres basses et marécageuses.
- Ainsi le chemin de Champigny à Villeneuve-Saint-Georges
commençait au Chemin vert et se terminait au territoire de
Boissy-Saint-Léger.
- Le Chemin Vert commence sur le chemin vicinal n°3 de Sucy à
Bonneuil, se dirige vers la N19, traverse le chemin de grande
communication de Fleury-Mérogis à Champigny et se termine au territoire
de Bonneuil.
- Le Chemin du Marais commence au Chemin vicinal N°3, il est
latéral à la voie ferrée sur une partie de son parcours et se termine
en impasse.
C’est dans la partie EST et boisée du territoire que l’on trouve le plus grand nombre de ces chemins de grande communication.
- Le Chemin de la Queue-en-Brie à Brie-Comte-Robert:
Ce chemin apparait sur la Carte de l’Abbé de La Grive de 1740, puis sur
le cadastre napoléonien de 1811 et sur tous les plans ultérieurs
(excepté sur celui de 1907 dû au géomètre, M. Garciot de Sucy-en-Brie
en raison d’un problème de recours juridique avec le Prince de Wagram).
Il commence à la Queue-en-Brie, traverse le Bois Notre-Dame et se
dirige vers Brie-Comte-Robert en passant par le Carrefour des huit
routes. Au XXe siècle il prend le nom de chemin du Poteau.
- Le Chemin de Marolles à la Queue-en-Brie:
Au sud, il commence au territoire de Marolles, traverse le quartier des
Bruyères, le Carrefour de la Patte-d’Oie formé par la rencontre des
chemins ruraux n° 21, 23, 28, 32 et la rencontre des chemins ruraux n°
25 et n° 2 dit de la Mare ou de la Gueule Noire pour se terminer à la
Queue-en-Brie.Il est devenu route de Marolles-en-Brie, puis, après le
carrefour, chemin de Saint-Nicolas.
- Le Chemin dit route de la Mare ou de la Gueule Noire et chemin du Bois Grand Val:
Ce dernier chemin commençait à la Fontaine de Villiers sous le nom de
chemin du Bois-Grand-Val; c’est ainsi qu’il est mentionné en 1728 sur
le plan topographique de Sucy, puis en 1811 sur le plan cadastral.
Ensuite il rejoint le chemin de la Gueule Noire pour s’enfoncer dans le
bois Notre-Dame et se terminer face à l’allée Dauphine.
- Le Chemin dit Route Royale:
Il commence au territoire de Boissy-Saint-Léger, traverse les Bruyères
et le bois Notre Dame au carrefour de la patte d’oie pour aboutir au
territoire de la Queue-en-Brie. D’autres chemins ont disparu, ainsi la
route des Bécassines re-colonisée par la forêt. Nous constatons que ces
chemins occupent, sur le territoire de Sucy-en-Brie le quartier
des Bruyères et s’enfoncent dans le bois Notre Dame
- Les chemins ruraux à l’intérieur de la ville.
- Un certain nombre d’entre eux ont disparu : ainsi le chemin des
Grès (ou Grais), le chemin de la Fontaine de Villiers, le chemin de la
Grande voie de Noiseau, le chemin du Cimetière, le chemin de Ceinture
du Fort.
- La référence la plus ancienne à trois de ces chemins se trouve
sur le plan de Sucy-en-Brie en 1412, puis sur le plan de 1691
appartenant au Chapitre de Notre-Dame, ensuite en 1728 sur le cadastre
et enfin sur le cadastre napoléonien de 1811. Ces trois chemins sont la
voie de la Procession, qui deviendra la rue de la Procession, la
Vieille Voie qui en 1728 sur le plan topographique devient le chemin du
Gros buisson, puis en 1811 chemin de la Saussaye-Cuisant, pour devenir
chemin des Grès ; il est coupé par la construction du fort en 1879-1881
et disparait en 1986 lors de l’implantation de la ZAC du Fort. Le
chemin de Villiers au bois Notre-Dame devient dès 1691 le chemin de la
Fontaine de Villiers, il est coupé lui aussi par la construction du
fort et disparaît également en 1986. Il n’en reste qu’une partie, sur
le territoire de Noiseau, qui aboutit sur ce que l’on appelle la Coulée
verte.
Évolution du nom et du tracé des différents chemins :
- Chemin du Clos de ville devenu rue du Clos de ville.
- Chemin de la Voie Suard devenu avenue du Petit val et rue Albert Dru.
- Chemin du Clos Bourgoin devenu Rue du Clos Bourgoin.
- Chemin des Monrois devenu rue de la Cité verte.
- Chemin des Picards devenu rue Charlotte et Roger Bouchard.
- Chemin du Moulin de Touillon qui est devenu rue Lamartine et rue
des Deux Communes et n’a gardé son nom que sur un petit tronçon qui
longe le parc du Morbras.
LES SENTIERS
C’est évidemment la partie la plus originale pour le territoire de Sucy-en-Brie .
Plan E. GARCIOT 1907 Sentiers subsistants dans les différents quartiers de Sucy-en-Brie en 2021- collection privée
Reconnaissance des sentiers
Les sentiers étaient en principe plus étroits que les chemins (1,33m
environ) même si parfois les deux appellations se superposent,
notamment dans ÉTAT DE RECONNAISSANCE DES CHEMINS RURAUX (1897). En
1895, une délibération du Conseil municipal décide de l’élargissement
de certains sentiers ruraux et en 1896 la commission départementale
homologue la proposition du maire et la notification en sera faite en
1897.
- Le sentier de Coulanges est porté à 9m et deviendra la rue de Coulanges.
- Les sentiers des Picards, des Fontaines, du Clos de ville, seront
portés à 8m. Les sentiers de la Carrière et de Chaumoncel à 7m
seulement. Il est à noter que ces sentiers deviendront des rues.
ÉTAT DE RECONNAISSANCE DES CHEMINS RURAUX 1897 - collection privée
Les sentiers disparus totalement ou en partie
- Le sentier du Dessous de la fontaine (prolongement de la rue du Clos de Pacy jusqu’à la rue des Fontaines).
- Le sentier de l’Abreuvoir, le sentier de la Carpiotte (entre la
rue de la Procession et la Grande voie de Noiseau, également disparue).
- Le sentier des Porcheresses disparu lors de l’opération de la Fontaine de Villiers, est devenu une allée.
Mais il reste encore une vingtaine de sentiers ayant gardé leur nom et
leur tracé, maillant le centre-ville. Ils se situent un peu partout en
ville : dans le quartier Montaleau, le quartier des Pendants, le
quartier du Clos de ville.
Dans le quartier des Pendants (ce terme désignant peut-être des arpents de terre en pente) :
- Le sentier du Moulin d’Amboile prend rue de Noiseau, se termine sentier des Bas Pendants.
- Le sentier des Bas Pendants commence à la Petite voie de Noiseau,
traverse les Hauts Pendants, sépare le lieu-dit les Bas Pendants et se
termine sentier du Moulin d’Amboile.
- Le sentier de la Fontinette commence à la Petite voie de Noiseau et se termine avenue de la Chapellerie.
Dans le quartier Montaleau:
- Les sentiers du Haut Picard et du Bas Picard: les deux commencent
rue des Fontaines et se terminent en impasse, de même le sentier
Montaleau.
- Le sentier de la Chaussée commence à l’avenue Maurice Berteaux et atteint maintenant la rue des Fontaines.
- Le charmant sentier du Vieux Val serpente entre les jardins et va de la rue des Fontaines au sentier de la Chaussée.
Dans le quartier de la Garenne subsiste le minuscule sentier du Four à
Chaux, commençant rue Lacarrière pour finir au sentier des Buttes
presque intégralement disparu.
Mais c’est le quartier du Clos de Ville qui s’étire sur le versant en
dessous de l’église où se trouvaient les vignes et les vergers qui est
sillonné par de nombreux sentiers. Ces sentiers ruraux sont liés dès le
Moyen Âge à la parcellisation des terres, mais aussi au lotissement des
ces terrains dans les années 1990 avec des remembrements et des
constructions.
D’ailleurs, les recommandations
édictées à ce moment là, visent à éviter les murs en briques ou en
béton, au profit de haies végétales. Si nous regardons le sentier des
Clos (le nom de clos désigne des terrains cultivés entourés de murs et
de haies), nous voyons qu’il figure sur le plan de 1691 et sur le
cadastre de 1811. Il rencontre le court sentier du Clos de Ville qui
longe le Jardin des Senteurs et les vignes de Sucy. Il croise le
sentier de la Fabrique (nom de la petite équipe qui gérait les biens
temporels de l’église) qui n’a subi aucune modification.
- Le sentier de la Garenne, long de 330m, débute au sentier
précédent ; il laisse à sa droite le sentier du Bas Boulard, traverse
la rue des Boulards et continue jusqu’au sentier des Longuaines (dont
le nom, tiré de l’ancien français longain qui signifie éloigné, désigne
les latrines, le dépotoir, le cloaque !), aboutit au verger
communautaire. Il croise le sentier de la Côte long de 434m
- Le sentier du Bûcher tire son nom des bûcherons qui y préparaient
le charbon de bois ; il se prolonge, après avoir traversé la rue Albert
Dru, par le sentier du Bertou qui se termine au Bois Guyard.
- Le petit sentier de la voie Suard de 61m se termine en impasse.
En bordure du quartier on trouve deux sentiers :
- Le sentier du Bois Guyard cité dès 1412 qui va de la rue du Clos de Ville à la rue de Boissy.
- Le sentier des Luards, agréable chemin mentionné lui aussi dès 1412.
CONCLUSION
Je voudrais conclure sur une image pittoresque de notre village: celle
de la vigne et de la viticulture à l’origine de l’existence des
sentiers particulièrement dans le Quartier du Clos de Ville. La culture
de la vigne est attestée dès 811, sur les versants et aussi sur le
Plateau, grâce au terrain de calcaire de Brie sur une couche de marne,
ce qui permettait à l’eau de s’écouler et de ne pas stagner.
En 1412, 45% des cultures sont dédiées à la vigne et aux arbres
fruitiers avec 90 hectares et 136 vignerons. Puis, petit à petit la
surface attribuée décroît entre le XVIIe et le XVIIIe siècle: en 1789
subsistent 50 hectares. Dans les années 1900, la vigne a pratiquement
disparu lorsque le phylloxéra lui donnera le coup de grâce. Toutefois
un groupe de Sucyciens passionnés, réunis en association, a replanté
des vignes; les premières vendanges eurent lieu en 1987. Il faut dire
que la qualité de ce vin était assez discutable et l’on disait que « Le
vin de Sucy faisait danser les chèvres ».`Mais cette production nous a
laissé, avec les parcs et les forêts, un bourg plein de charme et de
sérénité, malgré une urbanisation inévitable dans un bourg de la Petite
Couronne parisienne.
ÉLIANE COBENO
Pour aller plus loin : la vidéo de la conférence (15 mn) :
Pour les Sucyciens, le nouveau livre de la SHAS :
LA SOCIÉTÉ HISTORIQUE ET
ARCHÉOLOGIQUE DE SUCY-EN-BRIE (S.H.A.S.)
présente
« Par-dessus la Cocarde » - Sucy sous la
Révolution
Un livre de 88 pages environ,
au format 22 x 31,4, luxueux volume comprenant 58 illustrations couleur et le
texte du scénario du film tourné en 1990 à l’occasion du Bicentenaire de la
Révolution française par plus de 160 Sucyciens, volume relié cartonné
Disponible à la librairie L'Oiseau Moqueur (ou auprès de la SHAS) au prix de 25 €
Retrouvez toutes les lettres
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07/01/2022
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